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était une fois un vieux et une vieille qui habitaient au
milieu de la forêt. Ils avaient un chat et un agneau, et
vivaient tranquilles. Un jour, le chat vit un pot de crème
fraîche sur le rebord de la fenêtre. Personne ne le
surveillait : il sauta lestement et se mit à laper. Soudain,
il entendit la vieille et s’enfuit. Mais, dans sa
précipitation, il renversa le pot, qui se fracassa sur le
plancher.
- J’en ai assez de ce chat ! cria la vieille en colère. Il
ne sert à rien, il mange la crème, il casse tout ! Je ne
veux plus le voir ici !
e chat fila retrouver l’agneau
dans le pré :
- Agneau ! Sauvons-nous vite dans la forêt ! Le vieux et la
vieille veulent nous tuer ! J’ai tout entendu !
- Mais l’enclos est fermé ! bêla l’agneau, terrifié. Je ne
peux pas sortir !
Le chat leva le loquet, poussa la porte, et les deux amis se
mirent à courir de toute la vitesse de leurs pattes, sans
bien savoir où ils allaient. Il s’enfoncèrent dans la forêt.
rusquement, ils s’arrêtèrent,
figés de peur : près d’un buisson apparaissait la tête d’un
loup. Mais comme la tête ne bougeait pas, le chat avança
doucement et vit que c’était une tête coupée, sans corps.
- Emportons-la ! On ne sait jamais, ça peut servir !
Il se remirent en route, mais la nuit tombait. Ils
cherchaient un coin pour dormir, quand il aperçurent une
lumière dans les arbres. Ils s’approchèrent et virent, au
milieu d’une clairière, douze loups rassemblés autour d’un
feu.
Le chat réfléchit un moment, puis chuchota à l’oreille de
l’agneau :
- J’ai une idée ! Suis-moi !
Les loups entendirent une voix :
- Bonsoir, messieurs les loups !
ls n’en crurent pas leurs yeux
quand ils virent un chat et un agneau qui venaient vers eux.
Et ils se mirent tous à se lécher les babines. Le chat
s’assit près du feu et dit à haute voix :
- Holà, compère, apporte ici le gibier que nous avons tué
tout à l’heure, nous allons régaler nos amis !
- Le gibier ? fit l'agneau.
uis il comprit et courut dans
les buissons. Un instant plus tard, il revenait en portant
fièrement la tête de
loup. Les douze loups restèrent muets de stupeur. Le chat
dit :
- Pas celle-là, voyons ! Elle est minuscule. Va en chercher
une plus grosse !
L’agneau repartit et revint au bout d’un instant en ramenant
la même tête de loup. Le chat dit :
- Mais non ! S’il te plaît, apporte la plus grosse ! Non
amis ont faim !
’agneau revint encore une fois, toujours la même tête de
loup. Le chat dit :
- Bon, ça ira ! Faisons-la rôtir !
es loups échangeaient des
regards épouvantés.
Quatre d’entre eux se levèrent.
- Nous allons chercher un peu de bois pour le feu !
Et ils filèrent dans la forêt. Un moment après, quatre autres
loups se levèrent.
- Nos camarades tardent beaucoup. Allons les chercher !
Mais aucun ne revint. Alors les quatre derniers loups se
levèrent à leur tour.
- Ils on dû se perdre. Nous partons à leur recherche !
- Très bien ! dit le chat. Mais revenez vite !
n ours rencontra les douze
loups essoufflés et penauds.
- Que vous arrive-t-il ?
- Nous avons failli être massacrés par un chat et un
agneau !
L’ours éclata de rire.
- Un chat et un agneaux ! Vous n’êtes que des poltrons ! Il
fallait vous jeter sur eux et les dévorer ! Allons-y
ensemble !
uand le chat et l’agneau virent les douze loups revenir avec
l’ours, ni une ni deux, ils sautèrent dans un arbre. Le chat
eut vite fait de grimper, mais l’agneau étaient incapable
d’en faire autant ; il fit ce qu’il pu pour se hisser et
resta accroché par les pattes à une branche.
'ours et les loups, ne voyant
personne, s’assirent autour du feu.
L’agneau chuchota au
chat :
- Je n’en peux plus, je vais lâcher !
- Tiens bon ! dit le chat. Ils vont bientôt partir !
A ce moment, la branche cassa, et l’agneau tomba pile sur la
tête de l’ours.
Sans hésiter, le chat se mit à crier :
- Tiens bon, agneau ! Ne le lâche pas ! Tue-le ! Nous le
mangerons pour dîner !
'ours, terrifié, se dressa en
secouant la tête, et l’agneau fut projeté dans les buissons.
Les loups s’étaient déjà enfuis en hurlant et l’ours fila
sans regarder derrière lui. Le chat descendit tranquillement
de l’arbre et dit :
- Assez d’aventures ! Rentrons à la maison !
- Je ne demande pas mieux ! répondit l’agneau.
e vieux et la vieille furent heureux de voir revenir leurs
fidèles compagnons.
Ils avaient déjà oublié le pot cassé et leur firent fête.
Adaptation d’un conte roumain –
Illustrations de Yann Tabariès
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