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Le pauvre pêcheur et le gros poisson

 

Il y avait un homme qui vivait avec ses trois femmes. Les années passant l'homme n'avait plus de quoi nourrir ses femmes, alors deux l'abandonnèrent. Seule la dernière, qui était borgne, consentit à rester avec lui. L'homme était pêcheur. Chaque matin, il allait pêcher du poisson que sa femme faisait bouillir pour le repas quotidien. Un jour, il attrapa un gros poisson. C'était la mère des poissons. Il la sortit de l'eau et le gros poisson le pria ainsi :

- Aie pitié ! Remets-moi dans l'eau s'il te plaît ! J'ai laissé mes enfants au fond de l'eau. Tu sais les petits poissons que tu prenais chaque jour, ce sont mes enfants. A chaque fois que je pile le grain, je le vanne et ils ramassent les grains qui tombent. C'est à ce moment-là que tu les prenais et aujourd'hui voilà que tu m'as prise ! Libère-moi ! Remets-moi dans l'eau pour que je retourne veiller sur mes enfants et je te récompenserai. Tu me diras tout simplement ce que tu veux.

 

Le pêcheur lui répondit :

- Ce que je veux ? Tu sais que je suis pauvre et j'ai faim. Chaque matin, je vais pêcher et nous mangeons le poisson que ma femme fait bouillir. J'avais aussi trois femmes mais les deux m'ont abandonné. Il me reste maintenant que cette seule femme qui souffre de la faim avec moi.

 

Le poisson lui assura alors :

- Si tu me remets dans l'eau, je te récompenserai. Je te donnerai la richesse de telle sorte que tu n'auras plus faim. En plus de cela, je te donnerai la faculté de comprendre toutes les langues. Tu comprendras la langue de toutes les créatures ! Tu comprendras la langue des boeufs, des fourmis, des oiseaux, des chiens, des chats... tu comprendras toutes leurs langues. Seulement, tu écouteras et comprendras leur conversation mais tu veilleras à n'en parler à personne, sinon, tu mourras à coup sûr.

 

Le pêcheur répondit :

- J'accepte ! Je te libère et du me donneras la possibilité de toujours manger à ma faim !

 

Et le poisson lui donna du riz en abondance, et toute sorte de richesse. Il lui donna de plus la faculté de comprendre la langue de tous les animaux, mais s'il divulguait ce qu'il entendait de leur conversation, il mourrait à coup sûr.

 

Arrivé à la maison, l'homme jeta un grain de riz dans la cour et toute la maison se remplit de riz ! Sa femme prit le riz qui restait dans le grenier et le mit à sécher sur des nattes, et les oiseaux venaient picorer le grain ainsi que les poules. La femme qui était borgne avait une poule et un coq qu'elle élevait dans la maison. La poule qui savait que la femme était borgne, se tenait toujours du côté de l'œil crevé, et picorait tranquillement sans être dérangée par la femme. Lorsqu'elle se sentait rassasiée, elle se retirait pour se coucher et déféquer, puis revenait.

 

En revanche, le coq qui se tenait toujours du côté de l'œil valide, était chassé par la femme chaque fois qu'il s'approchait des nattes sur lesquelles le riz avait été mis à sécher. Finalement, le coq alla trouver la poule et lui tint ce langage :

- Je ne comprends pas ! Chaque fois que je m'approche d'une natte pour picorer, la femme me chasse. C'est peut-être parce que je suis un homme, c'est pourquoi on me chasse toujours. Toi, tu picores comme tu veux, tu te reposes, tu défèques et tu retournes picorer.

 

Et la poule lui répondit :

- Elle te chassera toujours ! Tu ne vois pas qu'elle est borgne ? Moi, je me tiens toujours du côté de l'œil crevé et toi, du côté de l'œil valide. C'est pourquoi, chaque fois que tu te diriges vers les nattes, tu es repéré et chassé.

 

Le vieux pêcheur qui était couché sur son hamac dans la cour, suivait attentivement la conversation du coq et de la poule, puis il éclata de rire jusqu'à tomber de son hamac. Il se releva et rit encore jusqu'à tomber de son hamac. La femme, surprise que son homme se mit à rire seul se fâcha ensuite :

- Beusinti ! Ce que tu fais là ne me plaît pas ! Nous sommes deux dans cette maison, dis-moi ce qui te fait rire au point de tomber plusieurs fois de ton hamac !

 

La femme, qui était borgne, pensait que l'homme se riait de son infirmité et elle poursuivit :

- Si tu ne me le dis pas ce soir, tu me le diras demain matin ; sinon, je te quitterai et te laisserai avec ta maison.

 

Le vieux pêcheur qui aimait bien entendu sa femme, redoutait, d'être abandonné par celle-ci. Il consentit alors à lui dire la raison de ses rires :

- Prends trois bottes de riz dans le grenier ! Piles-les et tu me prépareras un repas demain matin pour que je mange et te dire après la raison de mes rires.

 

La femme fit comme l'homme le  lui avait demandé. Elle pila le riz et le matin, elle prépara son repas. Après avoir pris son bain, l'homme se mit en place, suivi de son chien et de son chat. Il prit alors une poignée de riz et la déposa devant le chien. Il fit de même pour le chat. Le chien mangea rapidement sa part. Puisque le chat mangeait lentement, le chien se tourna vers la part du chat qui s'effaça pour le laisser manger. L'homme déposa de nouveau une poignée de riz devant chaque animal, mais le chien mangea rapidement sa part et se tourna encore vers la part du chat.

Quand le chat vit que le riz était presque fini dans le bol de l'homme, il s'assit, remua sa queue et dit :

- Continue comme ça ! Gourmand que tu es ! Tu manges ta part et tu reviens manger la mienne ! Mais, tu vas voir, l'homme va bientôt dire à sa femme pourquoi hier il riait à tue tête. Après cela, il mourra et nous allons tout perdre. Nous ne mangerons plus.

 

Le chien mangea le reste du riz sur le sol, remua sa queue, s'assit et dit :

- Est-ce que cela vaut la peine de le dire s'il faut mourir après ? Quand il aura terminé son repas, il pourrait dire ceci à la femme : "tu sais pourquoi je riais hier ? Je me rappelle quand nous souffrions de la faim, jusqu'à ce que mes autres femmes me quittent ! Toi seule, tu es restée. C'est pourquoi quand je regarde tout ce riz en abondance, mon cœur se réjouit grandement et je ris ! Je ne ris de rien d'autre."

 

Et se tournant vers l'homme, le chien lui dit : "Voila les paroles que tu diras à la femme."

 

Quand l'homme eût terminé son repas, il prit de l'eau et bu. Après cela, il s'adressa à sa femme en ces termes :

- Maria ! Tu m'a demandé, hier, pourquoi je riais, n'est-ce pas ? Je me souvenais de l'époque où nous étions tellement pauvres que je n'imaginais pas que nous pourrions être aussi riches aujourd'hui. Quand tu mets à sécher seulement trois nattes de riz, nous les regardons sans savoir quoi en faire. Voilà ce qui me faisait rire.

 

Et c'est ainsi que le chien sauva l'homme ! Et le chat aussi l'avait sauvé en prévenant le chien des intentions de l'homme de révéler son don à sa femme, ce qui lui aurait coûté la vie.

René Gomis

http://www.kandeer-manjaku.com

Texte édité avec l'aimable autorisation de l'auteur

 

 

 

 

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